Se souvenir / Se rappeler
Rappelons tout d’abord que « se souvenir » est un verbe transitif indirect, alors que « se rappeler » est transitif direct: on se souvient de qqch, on se rappelle qqch. Mais ça se complique avec « me, te, le, etc ». En effet, autant on peut comprendre « Je me le rappelle » en parlant de qqn ou qqch, autant on a peu de chance d’être compris si on dit « Je me te rappelle ». Ainsi, on admet la construction « Je me rappelle de toi ». Par contre « Je m’en rappelle » est à bannir.
Quant à leur différence de sens, c’est plutôt dans l’usage qu’on perçoit une subtile différence.
1/ Se souvenir, c’est laisser remonter involontairement à son esprit conscient des bribes du passé, plutôt des émotions, des sentiments.
Souvenir vient du latin « subvenire » qui a donné « survenir », qui comporte une certaine part de surprise.
Mais c’est aussi garder précieusement dans un coin de sa mémoire, une grâce dont on se sent redevable, ou un affront dont on compte bien se venger un jour. « Soyez sûr que je m’en souviendrai! »
Dans un français très littéraire, on peut utiliser « Il me souvient de …(ces jours heureux, mes amours perdues, etc;) »
2/ Se rappeler implique un effort de la mémoire, comme dans l’expression « Rappelle-moi son nom », et s’applique plutôt à une réalité concrète.
Même si on admet que ces deux verbes sont synonymes, on se rappelle plutôt un visage, un évènement, une chanson, alors qu’on se souvient d’un parfum, d’un baiser, d’un fou-rire. Il semble que quand on se rappelle ou quand on se souvient, on pioche dans deux compartiments différents de sa mémoire.
Il me vient le souvenir de cette longue nuit, passée au téléphone avec lui, à parler, rire, se taquiner. Mais je ressens une tristesse étrange à ne pas me rappeler sa voix, comme si le temps voulait en effacer la preuve, et ne m’en laisser que le réveil de mes sens.
Bonjour Jehanne,
c’est très joli ! votre exemple illustre cette subtilité avec beaucoup de poésie, merci beaucoup!
Bien à vous
Théo